Quand on a une idée de sketch, on ne sait pas forcément comment la développer. Avec un cas pratique, découvrez une façon possible d’aborder l’écriture : la méthode réflexive
L’idée initiale et ses origines
Je partage avec vous un début de sketch que je suis en train de développer. Tout est parti du fait que j’ai rencontré une femme qui avait un poste d’ingénieur dans une grande société, elle a quitté ce boulot et passé un CAP cuisine. Je connaissais aussi une vétérinaire qui était contente car elle venait d’obtenir un CAP petite enfance.
A chaque fois je me suis dit ” Mais pourquoi elles sont contentes? C’était bien plus compliqué ce qu’elles faisaient”
Donc à ce stade là, c’est juste quelque chose qui m’interpelle et ça devient ma PROBLEMATIQUE : “Comment peut-on être content de faire un travail plus simple et moins gratifiant en apparence que ce que l’on faisait auparavant?”
En me renseignant je comprends que c’est un phénomène global de société, que des gens trouvent “trop abstrait” leur boulot d’ingénieur et préfèrent des choses plus concrètes comme la patisserie. J’ai téléchargé un vieux numéro du magazine Society car il traitait justement du sentiment croissant d’inutilité des français au travail.
Avec ça je commence à avoir un contexte crédible et maitriser le jargon des gens qui décident de prendre ce type de virage.
L’Histoire 1 : poser la base de la réflexion
HISTOIRE 1 : Un ami m’a appelé pour faire la fête. Cet ami est ingénieur et il veut que l’on fête l’obtention de son cap de boulanger. Je ne vois pas pourquoi on fêterait ça. C’est tellement simple d’obtenir un cap quand tu es ingénieur et je ne comprends pas pourquoi il a fait ça. Il me dit qu’il “cherchait quelque chose de moins abstrait”. Son métier était de créer le fuselage des avions…Il n’y a rien de plus concret que ça. Ca maintient en vie des milliers de passagers. Si il trouve ça abstrait il a terriblement raison d’arrêter.
Quand j’en suis là, c’est bon j’ai toutes les idées en place ! Je n’ai qu’à bosser chaque phrase et développer pour rendre ça punchy, jouer les personnages, affiner le contexte etc. Bref faire du standup
L’Histoire 2 : pousser la réflexion en changeant de paradigmes
De la même façon que pour l’HISTOIRE 1, j’ai la structure avec un début, un axe et même une conclusion, il ne reste qu’à rendre ça drôle.
Le standup ne réside pas dans la chute
Je n’arriverai pas au résultat escompté avant plusieurs semaines, même plusieurs mois mais ce n’est pas grave car les histoires que je raconte me parlent et je vois un potentiel comique et réflexif.
Si les deux histoires doivent pouvoir faire rire séparément, je vais m’atteler à rendre leur résonance intéressante, en utilisant par exemple des running gags, en maillant les deux séquences avec des éléments communs etc.
Creuser encore
Pour que cette HISTOIRE 3 prenne vie, il y a un gros travail de documentation à effectuer : mieux connaitre le parcours d’Emmanuel Macron, lire certaines de ses interviews, ses discours. Trouver les éléments qui corroborent ma théorie selon laquelle il a juste accompli une boucle dans sa quête de sens. Il faut aussi que je me questionne sur ce que je veux dire sur Emmanuel Macron, quels points précis me laissent à croire qu’il n’a pas évolué comme on pourrait le croire. Sans ça, cette HISTOIRE 3 n’aura pas l’impact que je souhaite donner à cette conclusion.
Au final, le problème n’est pas tant de faire des blagues que de raconter de bonnes histoires, des choses qui vous intéressent et qui vont interpeler les spectateurs. Avec le temps et du travail ces histoires deviendront drôles et sûrement plus que d’autres histoires sans fond. Réfléchissez à ce que vous voulez raconter, aux histoires de vie que vous voulez partager sur scène, à ce qu’elles disent sur vous et sur le monde en général. Ce sont des histoires que vous allez répéter encore et encore, faites en sorte qu’elles aient du sens pour vous.
Super méthode !