Le choix des mots a une grande influence sur l’impact que peut avoir un sketch : finesse, précision, pertinence. Apprenez à sélectionner correctement votre vocabulaire.
Eviter les approximations
Souvent les comédiens débutants ont tendance à utiliser des “mots valises”, des expressions qui remplacent les mots précis : truc, machin, vous voyez ce que je veux dire…
Exemple : “Et là je prends le truc pour ouvrir la bouteille…” Ce truc pour ouvrir la bouteille a un nom : “tire-bouchon” . Ce mot est connu de tous, personne ne va être choqué que vous l’utilisiez. Donc la phrase juste serait : “Et là je prends le tirebouchon…” On économise quatre mots sur cet exemple en choisissant le mot adéquat !
A contrario si on garde “le truc pour ouvrir la bouteille” on oblige le spectateur à lui même faire le chemin intellectuel “Ah oui le tire-bouchon“.
Ne pas donner des bases fausses
Il arrive qu’en abordant un sujet superficiellement ou en prenant des racourcis, un humoriste donne des informations vagues ou fausses. Ces erreurs peuvent faire tiquer l’audience qui se dit “Soit c’est faux, soit il est ignorant“.
Exemple : “J’arrive au Canada et là bas il n’y a personne qui parle français“. Cela va à l’encontre de ce que les français savent du Canada, un pays au dessus des USA avec des gens qui parlent français avec un accent spécifique.
Pour que ça marche, il faut alors préciser : “J’arrive dans la région de Toronte au Canada et contrairement à Québec, personne ne parle français dans cette région…“
Eviter la répétition : les synonimes
Nous avons tous une base d’expression que nous répétons à volonté. Il est courant d’utiliser plusieurs fois les mêmes expressions ou les mêmes verbes dans une histoire. Toutefois il est bon de varier sa gamme d’expressions et d’aller chercher des variations, des mots plus précis, des subtilités de la langue française.
Exemple : si mon histoire tourne autour du fait de “Manger un hamburger” et que cette information doit revenir plusieurs fois alors je peux utiliser des synonymes : ingérer, dévorer, consommer, avaler…
Il existe de légères nuances entre chaque mot et elles pourraient chacun correspondre à un état d’avancement dans le sketch. Au lieu d’en revenir à “manger” et de répéter ce verbe, je peux tourner autour de toutes les nuances autour de cette action. De la même façon je peux aussi agir sur le mot hamburger : sandwich, repas, casse-croute.
A titre personnel quand je constate que j’emploie trop souvent les mêmes expressions je vais sur un site comme Synonymes et je cherche des variantes. Souvent ce que je trouve est beaucoup plus élégant et percutant que ce que j’avais à la base !
Un vocabulaire riche donne des informations précises
Se faire comprendre est la base de l’humoriste et aussi sa plus grande crainte. Employer les mots justes et les expressions adaptées est un vecteur important pour se faire déchiffrer par l’audience. Cela aide le public à mieux se projeter et accepter une histoire. Il exsite une réelle différence entre dire “J’étais sur l’autoroute et une voiture à gauche va à droite juste devant moi.” et “J’étais sur l’autoroute, je roulais sur la file de gauche et une voiture arrive et me fait une queue de poisson.”
La situation est plus précise, les actions et les implications aussi. Habituez-vous dès l’écriture à chercher les mots les plus percutants.
Simplifier quand l’information n’est pas pertinente
Il est inutile d’employer un vocabulaire trop technique si cela ne contribue pas à l’histoire. Dans un domaine technique particulier, on peut être tenté d’employer des mots trop précis.
Exemple : si vous demandez à mon père un marteau, sa première question sera : “Pour faire quoi?” Si c’est pour planter un clou alors il vous donnera un “Marteau de menuisier”. Si c’est pour arracher un clou, alors le “Marteau Arrache-clou” sera idéal grâce à sa fente. Si vos travaux nécessites de faire passer l’outil dans des passages étroits c’est clairement un “Marteau d’Electricien” qu’il vous faut etc.
Dans un sketch, quand j’ai envie de m’énerver et de casser un truc je dis juste “J’ai pris un marteau et j’ai commencé à taper sur la voiture comme un fou !!!”
Alors que tout le monde sait qu’un Marteau Rivoir est idéal pour le travail du métal et me connaissant c’est ça que j’ai utilisé pour déformer la tôle …
Le spectateur n’a pas besoin de ses indications techniques ! Il a juste besoin de savoir que j’avais un objet qu’il connait bien : un marteau.
La sonorité compte énormément
C’est un domaine du stand-up peu documenté mais l’impact des sonorités sur les blagues est particulièrement important. Le domaine artistique qui a sans doute le plus étudié ce choix des mots est la poésie : allitérations, assonances, rimes, homophonie etc…
Certains mots à sens équivalent ont juste plus de force que d’autres grâce à leur résonance. Des sonorités “dures” ont d’avantages d’impact, elles accrochent plus l’oreille. A vous de bien faire la balance entre la musicalité de vos expressions, leurs précisions et leurs effets sur le public.
Exemple : Le mot “flute” qui désigne un instrument de musique. Le mot se prononce rapidement et on n’insiste pas sur le “e” de fin sauf à Marseille…
Par contre si vous dites “Flute traversière” l’expression a plus d’impact au niveau sonore, elle attire plus l’attention. Reste à savoir si dans votre sketch il est important que ce soit une flute et non pas une flute traversière…
Il se peut aussi que dans certaines phrases des liaisons de mots rendent difficiles la compréhension, dans ce cas là, il est préférable de mettre un mot qui ne nécessite pas de liaison pour qu’il ressorte.
Exemple : Dans un sketch j’avais cette phrase : “Dimanche dernier j’ai tué et dépecé cette joggeuse.” L’information outre son côté “hard” ne passait pas bien, les gens ne comprenaient pas mais en analysant on voit que “tué” + “et” ça se confond en plus d’être dur à dire. Sachant que le mot d’après “Dépecé” contient aussi les mêmes sonorités tout en n’étant pas employé couramment. Les plus assidus remarqueront aussi que le rythme n’est pas ternaire. Avec le temps j’ai fini par dire “Dimanche dernier j’ai agressé, torturé puis assassiné cette joggeuse” La phrase est bien plus facile à comprendre ainsi. (Rassurez-vous il y a bien une blague derrière cette horreur…)
Choisir son vocabulaire doit faire partie de votre hygiène et de votre plaisir à écrire des sketchs. Votre façon de parler est votre signature, soignez là.