En attendant de remplir l’Olympia, certaines soirées vous obligeront à jouer devant peu de monde, comment se comporter dans ces cas précis?
Jouer ou ne pas jouer?
Quand une salle est peu remplie, j’aime utiliser la comparaison avec le cinéma : “Je suis très content quand je vais au cinéma et qu’il n’y a personne dans la salle. Ca me fait encore plus apprécier le film. Ce soir vous êtes peu nombreux, on va avoir des moments privilégiés“.
C’est dans cet état d’esprit que j’aborde ces (plutôt rares) soirées où il y a très peu de monde dans la salle. Je ne me pose jamais la question de : “On joue quand même?” même quand il y a juste 6 réservations.
Dès le moment où quelqu’un a acheté une place, je vais tout faire pour qu’il passe une bonne soirée. A mes débuts je ne comprenais pas cette mentalité et c’est au contact du comédien Riyad Bassim que j’ai fini par intégré ce concept. J’étais son auteur et lors de ses représentations à Paris, certains soirs il jouait devant 5 personnes, il n’a jamais annulé et a eu la bonne surprise à plusieurs reprises d’être particulièrement bien récompensé (financièrement) pour ses efforts.
Le paradoxe du standup
Si le commun des mortels appréhende de parler devant beaucoup de monde, un humoriste préfèrera toujours un public nombreux car il sait que l’humour est particulièrement contagieux : plus il y a de monde, plus les rires vont se nourrir les uns, les autres. A contrario, on appréhende les salles avec peu de monde car cette mécanique d’adhésion ne va pas fonctionner aussi bien, que l’effet de masse n’existe pas, que la gratification du rire va être plus difficile à percevoir.
Pourtant vos blagues sont les mêmes! Votre pouvoir comique ne change pas ! Vous devez pouvoir compter sur votre matériel pour séduire un public même très réduit.
Il y a de grandes chances pour que ce soit plus compliqué pour les captiver, que ça prenne plus de temps pour les mettre dans l’ambiance mais avec l’expérience vous devez pouvoir faire rire une petite audience aussi bien qu’une grande.
Les adaptations possibles
A titre personnel je trouve ça assez ridicule de jouer avec un micro quand il y a peu de public. J’en profite en général pour me libérer les mains et je fais confiance à la portée de ma voix. On est sur un registre un peu plus confidentiel, ça peut aussi vous aider à les faire entrer dans votre univers.
La deuxième chose que j’essaye de faire est de ne pas me focaliser sur les gens : ils sont peu nombreux, je vois clairement toutes leurs réactions, je ne dois pas laisser leur énergie guider mes sketchs. J’ai des blagues à faire, je connais mon timing, je sais que c’est drôle, je les livre. Je continue encore et encore, je sais que je vais finir par les avoir ! Et si pour une raison quelconque ça ne prend pas, j’aurais quand même tout donné…
Le troisième élément qu’il faut intégrer est que les interactions peuvent être plus limitées. Autant dans une salle pleine vous risquez de trouver les cas précis que vous cherchez, autant si le public est peu nombreux, vous risquez de vous confrontez à cette limite. Ce n’est pas grave ! L’interaction ne doit pas être le coeur de votre sketch, faites confiance à vos blagues.
Exemple personnel : En jouant deux soirs de suite le même set de 30 minutes théoriques, un soir où il y avait du public en nombre le set a duré 32 minutes, le lendemain avec une dizaine de spectateurs il ne s’est étendu que sur 26 minutes. Pourquoi? Parce que j’avais moins d’interactions et que je me suis focalisé sur la bonne façon de délivrer les blagues.
Par contre n’essayez pas de changer ce que vous êtes, ne vous dites pas : “Il n’y a pas beaucoup de monde, je peux faire n’importe quoi…“. Au contraire, sortez votre meilleur matériel pour les séduire.
Les auditions
Jouer devant peu de monde n’est pas forcément synonyme de soirée sans réservation, il y a aussi le cas des auditions, tremplins pour des festivals, qui peuvent se passer devant un public allant de 2 à 10 personnes. Dans ce cas précis, le public est vraiment là pour vous écouter et ne demande qu’à être convaincu que vous êtes drôle!
J’ai déjà auditionné pour des festivals où les sélectionneurs étaient assis non pas en largeur comme d’habitude mais sur une table en longueur : ils mangeaient et buvaient en même temps que les sketchs. Autant dire que ce n’était pas un public très chaleureux ou communicatif. Pourtant là aussi il faut y aller et donner le meilleur, faire confiance à son matériel.
Les conditions sont les mêmes pour tout le monde, si certains arrivent à tirer leur épingle du jeu c’est bien qu’il existe des possibilités pour y parvenir.
Là encore sortez votre meilleur matériel, jouez le sans attendre de retour ou chercher des interactions, laissez vos blagues et vos concepts parler pour vous.
Exemple personnel : j’ai déjà auditionné devant 3 personnes…J’étais tellement content de faire cette audition que j’ai vraiment défendu chaque blague avec amour et ça s’est vu. Pourtant si on me demande en dehors de ce contexte si j’ai envie de jouer devant 3 personnes, je préfère largement m’abstenir.
Plus il y a de monde plus c’est facile de faire rire…Malheureusement les salles vides ça existe aussi et il faut composer avec et toujours traiter le public avec le même respect…