Quand on se met à écrire on veut souvent être drôle de suite et à tout pris…Et si le secret c’était justement de ne pas penser à ça?
Chacun sa méthode
Pour écrire du stand-up il n’y a pas une seule façon de faire. Certains ont besoin de partir des blagues, d’autres des histoires (méthode réflexive), il en existe encore qui se focaliser sur les moments de jeu comme les dialogues…
Il faut juste trouver ce qui vous convient le plus.
Une autre méthode quand vous souhaitez aborder un sujet précis est d’avoir une approche globale et quasi scientifique de ce dont vous voulez parler.
Etape 1 : Faire le tour de la question
Quand vous avez déterminé le sujet que vous voulez aborder, posez vous face à votre feuille et notez tout ce qui vous vient logiquement à l’esprit sans chercher l’humour. Vous devez écrire tout ce qu’implique le sujet, tout ce que ça influence, tout ce que ça peut avoir comme répercussion dans la vie de tous les jours etc.
Exemple : Dans un article scientifique il est écrit qu’Après l’Homme et le singe les perroquets sont les seuls animaux capables de comprendre les probabilités (et de les utiliser)
Ce que je note : Des gens étudient les perroquets à notre époque.
On teste les capacités mathématiques des animaux
Les probabilités c’est le programme de 1ère/terminale à l’école
Les perroquets sont connus pour imiter les sons
Yago d’Aladdin est le perroquet le plus connu
Les singes sont tellement proches de nous qu’ils ont nos facultés cognitives
Qui a eu l’idée de faire des probabilités avec les singes? Idem pour les perroquets?
Qui finance ces études et dans quel but?
Comment un perroquet utilise-t-il cette capacité?
Comment l’a-t-il développé dans son évolution?
Est-ce que tous les humains maitrisent les probabilités? Est-ce un sens d’ailleurs?
Avant d’affirmer que le perroquet et le singe sont les seuls il ne faudrait pas tester tous les autres animaux?
L’expérience avec les perroquets porte sur l’acquisition de nourriture et la maximisation du profit.
Le fait qu’un oiseau comprenne les statistiques prouve que ce n’est pas l’unique apanage des primates.
La planète des singes ça fait logique mais la planète des perroquets…
Des expériences similaires ont été faites avec des nourrissons humains et de grands singes…
Nous avons un ancêtre commun avec les oiseaux remontant à 312 millions d’années.
Les scientifiques estiment que ça aide à comprendre l’évolution de l’intelligence et que ça favorise la recherche pour la création d’une pensée générale artificielle.
Etape 2 : Pousser la réflexion
Il ne faut pas hésiter à faire une pause entre les deux étapes, à revenir plus tard sur le sujet pour se laisser le temps de comprendre et de s’imprégner des différentes problématiques.
Le travail maintenant consiste à trouver les paradoxes et pistes d’exagération. J’essayer de construire une pensée, un propos, de déterminer des angles d’attaque.
Exemple (volontairement simplifié…Il ne faut pas hésiter à attaquer plusieurs angles de la même façon.) : Est-ce que le perroquet n’est pas l’animal le plus privilégié de la création ? : il vole, il sait imiter des sons, il est beau et en plus il a des affinités avec les mathématiques. Pourquoi Dieu l’a créé ainsi? Est-ce qu’il lui restait plein de capacités dans un sac et il a tout mis dans la même espèce? Sachant que le perroquet est super doué pour imiter les sonneries de téléphone, on a l’impression que tout cela fait partie d’un plan global qui nous échappe.
Les autres animaux peuvent être jaloux à juste titre ! Certains ont une vie misérable (déterminer lesquels en se documentant), ont des capacités plus que limitées et une évolution qui semble contre-intuitive par rapport aux besoins du monde actuel.
Etape 3 : Extraire la matière comique
Maintenant que le sujet a été approfondi je peux commencer mon travail pour rendre ça drôle. Dès l’étape 1 on peut sentir vers quoi on va tendre, quel type de situation ou d’humour cela va impliquer. Cette tendance est souvent confirmé à l’étape 2 car on affine son angle et le contexte. Il reste maintenant à exploiter ce que l’on a avancé et comprendre la dynamique de ce que l’on souhaite proposer : blagues courtes, histoires, dialogues, observations…
Exemple : A l’étape 2 j’ai avancé cette idée que Dieu avait doté le perroquet de capacités extravagantes un peu par hasard. La dynamique de mon idée comique va donc de me glisser dans la peau de Dieu et d’imaginer que je crée les différentes espèces animales.
Je vais avoir des blagues sur plusieurs espèces, en m’appuyant sur des spécificités stupides qu’ont certaines, jusqu’à arriver au Perroquet. J’imagine que Dieu doit se poser des questions pour en arriver à la création de cet animal. Qu’il a sûrement de l’ambition pour lui…Je me dis que ça doit le rendre fou de voir qu’il a créé ce superbe oiseau et que notre plaisir en tant qu’être humain c’est de le mettre en cage et de lui dire “Dis bonjour Coco”.
etc etc
Les blagues commencent à venir et en parallèle la réflexion se précise de plus en plus. Maintenant c’est un travail d’écriture et de réécriture classique : exploiter les situations, améliorer les blagues, rendre le tout compréhensible et cohérent. Tout ce que j’ai avancé dans les premières étapes peut servir (le nom du perroquet Yago…la capacité à imiter les sonneries de téléphone etc)
Le fait d’avoir bien étudié le sujet, d’avoir pris le temps d’en faire le tour est une quasi-assurance d’obtenir quelque chose d’intéressant à la fin. Ca ne veut pas dire que vous allez faire changer d’avis quelqu’un qui n’est pas d’accord avec vous sur un sujet mais au moins vous allez le faire rire en étant précis et pertinent !
Ne pas chercher à être drôle immédiatement quand on aborde un thème ou un sujet est aussi contre intuitif que payant. Des fois il vaut mieux être premier degrés en approchant un phénomène et se laisser le temps de prendre de la hauteur pour en tirer l’essence comique.