On peut croire qu’en humour tout se joue à l’écriture, que c’est la qualité des mots qui fait la comédie alors que d’autres paramètres, déterminés très en amont vont aussi changer la qualité du stand-up
Une blague = une attitude
C’est une notion que j’avais tendance à expliquer aux comédiens un peu sur le tard, lors de leur deuxième année d’apprentissage…Mais très vite je me suis aperçu qu’il fallait aborder dès le début l’idée suivante : « Une blague = une attitude »
Cette pensée simple doit guider votre stand-up ! Elle doit vous accompagner à l’écriture, lors des répétitions et sur scène.
A l’écriture : associer une attitude à une blague c’est l’assurance d’avoir un angle clair et une logique respectée surtout si des personnages interviennent. En effet dès lors que vous parlez à quelqu’un d’autre, chacun doit avoir une attitude claire et compréhensible dès le début.
Les répétitions : en répétition, si vous impactez l’attitude choisit à votre façon de répéter alors vous allez fixer la façon la plus juste de jouer, celle qui correspond le mieux à la blague.
Sur scène : Vous raccrocher aux attitudes quand vous vous produisez face à un public c’est une façon d’être sûr d’être dans le jeu, dans la communication, dans le message non-verbal. On sait que la majorité du message que l’on souhaite faire passer ne dépend pas des mots mais de la façon dont on les prononce, l’attitude est là pour rendre cet aspect là cohérent et impactant.
Une question de logique
Définir une attitude face à une blague est autant une question de logique qu’une notion qui peut et doit évoluer.
Pour comprendre quelle attitude adopter, il faut analyser sa blague et comprendre de quoi elle parle. Ca semble évident quand on le dit mais qui prend vraiment le temps de soupeser la situation illustrée par ses vannes et d’en déduire le sens réel? Pour cotoyer énormément de comédiens, je peux vous assurer que peu sont ceux qui y consacre un réel effort.
Vous devez comprendre la dynamique de la blague et ce qu’elle implique pour pouvoir y coller une attitude. Certaines blagues sont animées par la joie, d’autres la peur, le doute, le stress etc…
Exemple : Si je raconte que mon fils a dessiné au feutre indélébile sur ma télé 4K alors il semble logique que la colère soit l’attitude première pour aborder le sujet. Je peux aussi être plus précis en disant que c’est une « rage contenue » car au final ce n’est qu’une bétise…couteuse, mais une bétise.
Déjouer l’attitude première
On peut aussi jouer sur un effet de contraste. De la même façon que vos blagues offrent des révélations, l’attitude peut aussi offrir un niveau de lecture que l’on attend pas.
Exemple : Toujours pour l’histoire de mon fils qui a dessiné au feutre indélébile sur ma télé 4K : si mon attitude est joyeuse en racontant cette histoire alors je vais créer une attente car il y a quelque chose de curieux dans ma façon d’aborder le sujet. C’est un effet que je peux prévoir et aménager
Attention : si l’attitude est trop dissonante par rapport à la blague ou au sujet vous risquez de perdre la « congruence » c’est à dire cette cohésion entre ce que vous dites et ce que vous renvoyez.
Une blague = 2 attitudes
Souvent vous constaterez que ce n’est pas une attitude qui constitue une blague mais deux. Le changement d’attitude correspond à un changement d’état et souvent la bascule se fait entre l’angle et la punchline. Pourquoi? Parce que dans une blague classique constituée de prémisse+angle+punchline, la punchline offre une relecture de la prémisse, une réinterprétation des éléments précédents. C’est donc le moment idéal pour apposer aussi une autre attitude qui permet de mieux comprendre ce point de bascule.
Exemple : PREMISSE Mon fils a dessiné au feutre indélébile sur ma télé 4K (attitude : rage contenue)
ANGLE je lui ai dit : « Regarde ce que tu as fait ! »(attitude : rage contenue)
PUNCHLINE « Un seul p à salope ! » (attitude moralisateur gentil)
Une fois que j’ai fixé ça, je peux plus facilement me l’approprier et rendre justice à la blague. De la même façon je peux envisager des variations, peut-être que je ne dois pas être moralisateur mais fier. Ce changement d’attitude peut avoir un impact direct sur le choix des mots. Si je suis fier alors peut-être que je dois dire « Bravo » à la punchline et même changer légèrement l’idée de base : « Bravo tu as mis un seul p à salope ! «
Définir une attitude c’est optimiser une blague en l’obligeant à respecter sa propre logique. Gardez en tête 1 blague=1 attitude et vous verrez vos sketchs s’améliorer grandement.